Du cote de Shisui, une petite ville de la prefecture de Chiba, il y a un coin que je vais visiter regulierement quand je suis au pays. Une belle juxtaposition de bois, friches et rizieres, ou vivent des passereaux, rapaces, petits mammiferes, serpents ou grenouilles. Il y a des stations d’orchidees -helas devenues trop rares-, une mare ou viennet pondre les grenouilles rousses du Japon, une riziere aux ozyrias -minuscules poissons d’eau douce, jadis communs partout-… la campagne japonaise telle que j’ai connue, qui disparait peu a peu dans le Japon industralise.
Il y a six ans, lorsque je tentais de rencontrer les chiens viverrins au crepuscule, j’ai pu observer un grand oiseau volant au-dessus des rizieres et friches, une sorte de corneille geante, sans tete. C’etait un rapace nocturne, une chouette de l’Oural.
L’espece est largement repartie en Eurasie, et commune au Japon. Mais je pensais qu’elle vivait plutot dans les montagnes, pas dans ce coin certes un peu sauvage mais entoure de grandes routes, chemin de fer, avec des villages et villes pas loin…
J’y suis retourne l’an denier, decide a trouver leur nid ou jeunes (mi-mai etait le bon moment). Mais plusieurs jours de marche dans les bois se sont soldes par un echec: pas de vieux arbres avec une cavite, situation classique de nidification.
Mais mon insistance avait tout de meme finit par payer. Tres tot un matin, j’entendis une sorte d’aboiement de chien « Wof wof wof », mais tout doux… Je me suis arrete, reste la immobile et j’ai vu un oiseau arriver et se poser sur une branche a moins de vingt metres. La chouette etait venue m’observer.
Le meme cirque s’est reproduit les jours suivants: aucun doute, leur nid n’etait pas loin. Le troisieme jour, j’entendis des cris stridents. Je me suis rapproche a la lisiere d’ou cela venait, et j’ai enfin pu voir un gros poussin, ou plutot un jeune sorti du nid, quemandant de la nourriture aux parents.
Cette annee, vu que j’y etais a partir de mi-avril, je suis retourne au meme endroit, decide cette a fois a trouver le nid. La localisation ne fut pas longue, un bel arbre avec une cavite… visible depuis un sentier!
J’y suis reste un bon moment mais aucun mouvement. Cependant, il etait deja dix heures de matin, pas forcement ideal pour voir les nocturnes… je suis revenu donc le lendemain tres tot, et la, enfin bingo: une boule de duvet bougeait dans la cavite.
Par la suite, j’ai pu voir et dessiner aussi les parents qui venaient nourrir les petits (je pense qu’il y en avait deux) mais jamais trop longtemps, histoire de ne pas trop les stresser.
Le seul regret de toutes ces observations: j’ai du quitter mon pays mi-mai, avant de voir les jeunes chouettes sortir du nid et commencer leur sevrage.